Acte 3

Scène 6

d'Assas, puis Dubois d’Assas
(seul, à part)
Oui de nos ennemis j'ai percé le dessein
Déjà depuis longtemps j'ai cru le reconnaître
L'astucieux anglais veut nous surprendre en traite
Mais je l'attends ici les armes à la main.
D'ici je veillerai sur notre corps d'armée
Dans l'ombre de la nuit à mes yeux dans ce bois
Étoile as-tu brillé pour la dernière fois ?
Ne dois-je plus revoir l'image bien aimée
De celle qui la bas pense à son chevalier
Et qui dans son amour, s'oubliant elle même
Aime encore son pays bien plus qu'elle ne m'aime
Voulant pour fleurs d'hymen des palmes de lauriers ?
O nuit, dans ton silence et dans ton doux mystère
Dans quel monde nouveau m'as-tu donc transporté ?
Je suis comme saisi par l'immortalité
Et je respire un air qui n'est plus de la terre
O Dieu de ma patrie, O Roi de tous les Rois
Si pour sauver les Francs, il faut une victime
Donne à ton serviteur ce dévouement sublime
Toi qui sauvas le monde au sommet d'une Croix.
 
Le sergent Dubois
(survenant et à mi-voix)
Capitaine d'Assas, suivant votre ordonnance
J'ai visité tous les postes de nuit du camp
Deux braves officiers partis de Clostercamp
Ne sont pas revenus de leur reconnaissance.
 
d'Assas
(à mi-voix)
Voila bien le sujet de mon pressentiment
(à haute voix)
Va prévenir, Dubois, toutes les sentinelles
D'observer strictement leurs consignes formelles
Et de se préparer à tout évènement.
Va dire à mes chasseurs de veiller mieux encore.
 
Dubois
Capitaine, je pars à vos ordres soumis.

d'Assas

A tout moment j'attends de voir les ennemis
Car ils n'attendront pas de voir poindre l'aurore
Mais tout est préparé pour déjouer leurs plans
Ils ne peuvent passer que par la forêt sombre
Mais avant qu'ils aient pu se grouper en grand nombre
Le camp sera debout ; nos soldats frémissants
Feront sonner la trompette guerrière.
En attendant veillons : nul échos, aucun bruit
N'est venu pour troubler le calme de la nuit.
Je vais examiner le bord de la clairière.
(Quand il est parti, les soldats ennemis envahissent la scène)
 
Un chef
Dans les taillis touffus cachez tous vos soldats
Nous voici près du camp mais la moindre imprudence
Trahirait nos desseins faites donc grand silence.
Lorsque cet officier français reviendra sur ses pas
Saisissez le sans bruit, donnez lui l'assurance
Que vous le sauverez s'il se tait. Le voici.
 
d'Assas
Je crois que des soldats ont passé par ici.
Qui vive !
 
Une voix
Ami !
 
d'Assas
Le mot

 
Une voix
Fischer !
 
D'Assas
Non, Non, c'est France.
(Il s'avance dans le bois - alors des soldats alliés l'entourent et quand il se retourne, il se voit cerné d'ennemis)
 
Un soldat allié
A notre volonté si vous êtes soumis
Votre vie est à nous, nous pouvons vous la rendre.
Pas un mot !
 
d'Assas
Mon honneur qui donc pourrait le prendre ?
A moi Auvergne, à moi, ce sont les ennemis
(il est percé de coups)

d'Assas
(expirant au milieu des français qui viennent à cet appel)
Je meurs mais j'ai rempli mon devoir ; la souffrance
N'est rien pour le soldat qui tombe au champ d'honneur.
O Dieu prenez mon âme. Auvergne à toi mon coeur.
(voyant le porte-drapeau qui passe)
Je meurs près du drapeau ! Vive, vive la France !