HABITAT ET PEUPLEMENT

 

                Il a déjà été parlé très sommairement de l'habitat en constatant que la majorité des habitants de la commune était regroupée dans le hameau de Villesèque qui s'est beaucoup modifié depuis deux siècles.

                Le premier plan de ville connu se trouve dans le cadastre créé par Napoléon et datant de 1812. On peut constater que le hameau de Villesèque ne comportait que quelques maisons groupées autour du carrefour actuel de la D 35 et de la D 182 qui n'était alors que le chemin du Moulin de Beaucous ; l'absence d'un pont sur le Crieulon à hauteur du moulin interdisant d'aller jusqu'à Sauve comme aujourd'hui. Le chemin de Sauve partait cinq cents mètres au sud du hameau de l'époque en face de l'actuelle route de Canaules, traversait le Crieulon, sans doute à gué, passait à coté du Mas de La Roque et tirait vers Sebens.

                Des rendements très faibles dus à l'absence d'engrais interdisaient de laisser des terres en friche, aussi les gens se serraient-ils dans les maisons.

                L'homme se déplaçait à pied ou avec son mulet mais les jours n'étaient pas plus longs qu'aujourd'hui ; aussi, pour économiser son temps et sa peine, les diverses cultures occupaient-elles des couronnes autour du lieu habité : au plus prés, le jardin potager qui demandait un entretien presque quotidien ; un peu plus loin les champs cultivés et à l'extérieur les zones de parcours des moutons. Les mûriers étaient plantés le long des chemins pour rendre plus aisé le ramassage et le transport des feuilles au moment où le ver à soie se fait si vorace.

                 Aujourd'hui, l'homme consomme beaucoup plus d'espace pour lui au détriment des surfaces cultivées. A voir le plan actuel des constructions dans la commune on pourrait très facilement calculer les hectares ainsi soustraits aux cultures.

                Quel est l'impact sur la nature quand les impératifs économiques sont prépondérants et que certaines terres sont laissées volontairement en friche pour maintenir le volume de production assez bas pour que les prix restent à un niveau permettant aux paysans de vivre plus ou moins bien.

                Petit à petit des maisons individuelles ont été construites le long des routes ; le mouvement a commencé dès le début du XIX ème siècle mais à une échelle réduite ; la seconde moitié du XX ème siècle a fait du village une rue de deux kilomètres du Bos Nègre aux Plans sans compter les ramifications vers Sauve ou la Capelane. Il faut bien loger la population qui, en deux décennies, a augmenté de cinquante pour cent.

 

                En janvier 1850, la commune comptait 48 électeurs soit, en comptant les épouses et les enfants plus nombreux alors qu'aujourd'hui, entre 150 et 200 habitants. En 1840, elle comptait exactement 176 habitants.

                Les derniers recensements lui accordent 105 habitants en 1975, 121 en 1982 et 152 en 1990 pour une liste électorale comportant 56 électeurs et 54 électrices. Des électeurs plus nombreux, mais des familles moins nombreuses et la majorité à 18 ans expliquent que, malgré la remontée de la population, la commune soit moins peuplée aujourd'hui qu'il y a cent cinquante ans.

                Les différences importantes entre les deux époques concernent la répartition socio-professionnelle et les tranches d'âge représentées.

                En 1850, on trouvait 21 cultivateurs, 3 domestiques et 1 berger soit 25 personnes sur 48 qui s'occupaient directement d'agriculture. Il convient d'y ajouter les neuf propriétaires fonciers et les deux Ferrand, aubergiste et propriétaire foncier. De plus, les deux meuniers, les deux maréchaux et les trois voituriers vivaient aussi grâce au monde agricole. La présence à Villesèque de ces trois derniers montre, qu'à cette époque, le village ne vivait plus uniquement en autarcie et avait besoin de transporteurs pour exporter ses productions.

                Les tranches d'âge sont significatives d'une époque où la campagne n'était pas encore devenue un désert pour la jeunesse.

                Les 21-29 ans étaient 14 soit 29%,

                les 30-39 étaient 9 

                les 40-49: 10.

                Les moins de soixante ans représentaient 87% de la population à une époque où la seule retraite était le "Repos Eternel". Les deux doyens du village avaient 68 ans. Des bambins par rapport au doyen des années 1990 !

 

                Cent cinquante ans plus tard, les actifs vivant de la terre peuvent se compter sur les doigts des deux mains et une proportion importante de la population est formée de retraités du terroir ou "d'immigrés" séduits par la nature et le calme après la vie frénétique des grandes villes. Il n'y a pas que des retraités dans la commune mais les emplois sur place ne sont pas nombreux et nos ancêtres auraient-ils pu imaginer que Villesèque soit presque devenu une "banlieue dortoir" de Montpellier ou d'autres villes des environs.

                  Heureusement, il reste quelques paysans qui, ne voulant pas devenir seulement des techniciens de l'entretien de la nature, savent encore cultiver la vigne et  produire ce "bon vin qui réjouit le cœur de l'homme" et qui, consommé avec modération, est la plus saine et la plus hygiénique des boissons, surtout depuis que les efforts d'encépagement permettent de produire une qualité reconnue bien au-delà des limites du canton.

   

                Dans ses "Statistiques sur le département du Gard", Hector Rivoire conclut sa notice sur la commune par ces deux phrases écrites en 1842 :

                " Ce vallon, qui naguère n'était formé que de landes et bruyères, est devenu, en l'espace de cinquante ans, un petit village dont le terroir est bien cultivé. Il est à présumer que, par sa position avantageuse, le village de Saint-Jean-de-Crieulon deviendra par la suite une commune considérable."

 

                Cette vision optimiste ne s'est pas vraiment réalisée mais le village, sans être devenu une commune considérable, reste un lieu attirant où il fait bon vivre.

                 L'occitan n'est plus guère pratiqué et c'est bien dommage car il nous a laissé un certain nombre de sobriquets savoureux, non sur Saint Jean de Crieulon, mais sur les villages des alentours. Les habitants de Durfort sont "lous trissa-bouï" les hacheurs de buis, ceux de Sauve au choix "lous diamané" les petits diamants, "sauto-rouquet" saute rocher, "fourquedian" faiseurs de fourches ou "couet" de petite taille.

 

                Un dicton bien agréable détaille les spécialités locales :

                    Sauvo pèr canta,              (Sauve pour chanter,

                    Quissa pèr dansa,              Quissac pour danser,

                    Canaulà pèr bèuré.             Canaules pour boire.)

 

                Situé entre ces trois communes, notre village devrait être une sorte de paradis terrestre et c'est la raison pour laquelle les cigales, qui, comme les anges, font de la musique avec leurs ailes, y chantent si fort au cœur de l'été.

 

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