Acte I

Le théâtre représente le parc du château du Mercou le 24 août 1756. [i]


Scène 1

Henriet et Dubois, serviteurs de d'Assas.


Henriet
Eh ! quoi mon cher Dubois, d’où vient cette tristesse
Que reflètent tes yeux... Quelque grave malheur
aurait-il donc atteint notre gentil seigneur
Je connais en effet votre profonde tendresse
Pour notre chevalier
 
Dubois
Je ne sais cher ami
Mais déjà ce matin à l'heure où tout sommeille
La voix du chevalier a frappé mon oreille ;
Il errait dans le parc ; à sa voix, j'ai frémi
Tant ses pas, son regard et sa démarche même
Traduisaient un chagrin que je voudrai bannir ;
Aujourd'hui de nombreux seigneurs doivent venir.
Je gémis, Henriet, de cette peine entrevue
De notre chevalier ; il faudrait en ce jour
Que tout reflète ici la joie et l'allégresse
Car c'est fête au château.
 
Henriet
Veux-tu que je m’empresse
Auprès du maître aimé, car tu sais qu'à mon tour
Je professe pour lui l'estime la plus grande.
Je vais l'interroger ; il sera confiant
De son vieux serviteur ne suis-je pas l'enfant ?
 
Dubois
Tu ne peux Henriet faire cette demande
Du maître il faut surtout respecter le désir.
Donnons donc tous nos soins à préparer la fête.
Veillons à ce que tout superbement s'apprête
Ce sera le meilleur moyen de le servir.
Le marquis de Montcalm arrive aujourd'hui même
Il revient de la cour. Oh ! Quel bonheur pour moi ! .
Nous entendrons parler de la France et du Roi
Car après Dieu, mon cher, c'est là tout ce que j'aime.
 
Henriet
Fi donc mon grand ami ! Malgré tout l'ardeur
Que rend si bien l'écho de ton âme fidèle
Pourquoi donc oublier l'aimable tourterelle ?
Qui t'offre en ce moment sa chaumière et son coeur.
Elle est là ! Je l'entends et sa voix douce et tendre
Lutte avec les auteurs de tes grands sentiments
Enfin, mon cher Dubois, n'avons nous pas vingt ans ?
 
Dubois
Oui nous avons vingt ans, mais laisse moi t'apprendre
Ce que cet âge là doit à tous inspirer :
A côté de l'amour et de sa folle ivresse
Il est d'autres élans que l'ardente jeunesse
Doit surtout ressentir et ne pas oublier.
Ces élans, c'est la voix qui parle au fond de l'âme
Ces ardeurs c'est le cri de Patrie et de Foi ;
C'est l'honneur de mourir pour la France et son Roi
Qui dans les jeunes cœurs fait scintiller sa flamme.
C'est ...

 



[i] - Château appartenant à cette époque au baron François d'Assas, frère du chevalier - Notes de M. Boiffils de Massanes.